Mercredi 13


Le réveil sonne. 2h30. Thomas et Noah sont déjà levés, en train de boire un thé chaud à la lampe frontale. Il fait nuit noire et un brouillard humide à s'en geler les os recouvre toute la vallée...

Je vais faire pipi, mais après à peine trois pas, ma frontale s'éteint. Merde. Le froid a du vider les piles car elles étaient quasi neuves. Heureusement, Thomas en a de rechange.

Nous décidons d'attendre jusqu'à 4h si le temps s'améliore. Puis nous nous remettons rapidement à l'abri dans nos duvets quand la pluie arrive.


Nous nous réveillons une fois le jour bien levé, et j'ai toujours mal à la tête. Petit déjeuner, puis re-pluie, alors re-duvet. Il commence à faire vraiment chaud dans la tente. Trop chaud. Je décide tout de même d'essayer de dormir à nouveau pour faire passer la migraine, pendant que les gars vont au refuge boire des bières. Je suis contente d'avoir plus de calme et je dors jusqu'à 14h en faisant plein de rêves étranges. La douleur est moins forte mais ne m'a pas quittée. Je vais me promener au bord de la rivière, et s'il n'y avait eu personne autour j'en aurais volontier profité pour un bain glacé.


J'ai faim, et je suppose que les gars ont déjà mangé, alors je me fais un sandwich tomates ail. À peine deux bouchées plus tard, je vois Thomas arriver en courant. Quelqu'un s'est cassé la jambe. Il est à 3h de marche vers Ishinca. Ils y vont tous les trois avec James l'Anglais d'hier, et l'ami de l'accidenté, revenu en sang chercher des secours. Il doit être aux environs de 16h lorsqu'ils commencent à trottiner vers les hauteurs. Je pense à ce pauvre garçon, tout seul là haut dans le froid avec sa jambe cassée. J'espère qu'il tient le coup.


J'aurais aimé me faire un gros repas pour l'ascension de demain, mais je ne trouve pas comment allumer le réchaud de Jonas. Alors je mange le reste de pain avec le dernier oeuf dur de la veille.

Je suis un peu inquiète pour les gars dans la montagne, mais je m'endors quand même tôt, avec mon interminable mal de crâne, fidèle au poste.


Je suis réveillée par le retour des gars à 23h. Ils ont descendu notre accidenté Belge, avec ses non pas une mais bien deux jambes cassées, jusqu'au bivouac à seulement quelques mètres plus bas que là où il était. Il va passer la nuit là haut, en compagnie de plusieurs policiers/secouristes, arrivés beaucoup plus tard, vers 22h. Il n'y a pas d'hélicoptère. Ils doivent attendre que le jour se lève pour le descendre en civière jusqu'au camping. À partir de là, il pourra rejoindre le premier village 13km plus loin, à dos de mulet. Autant dire qu'il vaut mieux s'abstenir d'avoir un accident par ici.

Jonas me raconte tout ça, puis me prévient que l'on part pour Ishinca vers 3h, avant de sortir son matelas et duvet pour dormir sous le ciel abondamment étoilé. C'est bon signe pour demain. Quant à moi j'ai déjà suffisamment froid dans la tente, je regarderai les étoiles plus tard. Et je n'ai plus mal à la tête, enfin.